mercredi 17 juin 2009

L’Inde terre d’accueil pour les Tibétains en exil

L’Inde, laïque et républicain, qui avec plus d’un milliard d’habitants constitue la plus grande démocratie du monde est la première terre d’asile pour près de 130 000 Tibétains. Et cela dure depuis 50 ans, depuis l’accueil offert par le Premier ministre Indien, le Pandit Jawaharlal Nehru qui proposa le site de Dharamsala, dans les contreforts himalayens du nord de l’Himachal Pradesh, et où s’installa Sa Sainteté le Dalaï Lama et son gouvernement en 1960. Thank you India http://50yrsinexile.com/ L’Inde pratique l’hospitalité avec les Tibétains de l’exil, en « bonne intelligence » dans le respect, la tolérance et la non-violence si chers au Mahatma Gandhi. Anna Gavalda ne dit-elle pas que « ce qui empêche les gens de vivre ensemble ce n’est pas leurs différences, c’est leur connerie. » Rendons aux peuples intelligents l’hommage qu’ils méritent ! A Dehli, la « Tibetan refugee colony » de Majnu Ka Tila est une petite communauté d’exilés de près de 2000 personnes, qui ont trouvé refuge loin de leur pays, au fil des années qui ont suivi l’exode. Un pays où ils ne peuvent ni s’exprimer librement, ni grandir dans leur culture et leur identité, ni prier selon leurs pratiques ancestrales …Le Tibet d’aujourd’hui ne connaît pas les Droits de l’Homme. Et pour fuir le système de rééducation à la chinoise, des hommes, des femmes et des enfants de tous âges ont franchi des cols de l’Himalaya, à plus de 5000 m d’altitude, au péril de leur vie, durant trois semaines. Et ce, depuis trois générations …. Dans cette mini-cité aux marges de l’immense Dehli, quelle impression étrange que de découvrir un petit monde clos, à l’écart de l’agitation bruyante de la ville, loin des klaxons incessants et des cris stridents d’oiseaux. Les seules traces du petit peuple des rues de l’Inde sont les chauffeurs ou rabatteurs de taxis et rickshaws qui guettent le touriste sur le seuil du site, des nettoyeurs d’oreille, flammèche de coton en main qui proposent leurs services, ou des femmes en sari qui mendient, un enfant à demi nu sur la hanche. Parfois une vache sacrée ose s’y aventurer et déambule paisiblement. Aussitôt franchie la haute porte, ornée des symboles du bouddhisme tibétain, et où flotte librement le drapeau du Tibet, on sent que l’on est ailleurs …dans une sorte de sas entre deux mondes. Or un sas ne devrait être qu’un lieu de passage transitoire, sauf que ce passage-là semble s’éterniser depuis de trop longues années. Cinq décennies d’exode, d’exil et de génocide. Sur les rives de la rivière Yamouna, un dédale d’étroites ruelles piétonnières abrite une vie qui semble recroquevillée sur elle-même, comme en arrêt sur image. Peu de passants, quelques étrangers -militants de la cause tibétaine- viennent là pour rencontrer les Tibétains de l’exil et leur apporter leur soutien indéfectible. Les rares touristes déambulent de boutiques en boutiques. Les immeubles sont si hauts et les ruelles si étroites que le ciel disparaît entre les balcons où le linge sèche, entre les climatiseurs qui s’égouttent et les réseaux de fils électriques incroyablement entortillés. Pas de ciel en vue, pas d’étoiles, vers où s’envolent les lambeaux d’espoir de ceux qui y vivent ? On se demande si les noms des hôtels et restaurants : Lhasa, Potala, Tibet, Ama.ne donnent pas aux exilés la nostalgie du pays ? Les nombreux cybercafés, bureaux de téléphonie aux tarifs plus qu’intéressants pour le Tibet, les agences de voyage qui proposent toutes des bus pour Dharamsala semblent leur donner l’illusion d’être toujours reliés au Pays….. ou bien à son « cœur transplanté » qu’est Dharamsala ? Communications et liens sont-ils réels ou virtuels ? Les boutiques évoquent un peu le Tibet …pour le touriste seulement : stands militants de livres, DVD et objets en tous genres aux couleurs du drapeau tibétain et effigie du Dalaï Lama. Librairies bouddhistes, échoppes d’artisanat et boutiques de perles et bijoux où la turquoise domine de son éclat bleu, ateliers de fabrication de thankas aux machines à coudre bruyantes. Pour les Tibétains eux-mêmes, la reconstitution d’un décor de style Tibet, suffit-elle à maintenir le désir du retour? Le Tibet de l’intérieur, « province pas du tout autonome de la Chine » est devenu une prison, mais les Tibétains de l’extérieur ne vivent-ils pas eux aussi captifs d’un système qui ne leur donne aucun droit, ni ici ,ni ailleurs ? Ces enfants rieurs qui lavent des assiettes accroupis à un point d’eau, quel sera leur avenir ? Nés ici, fils ou petits-fils des premiers exilés que savent-ils des répressions, des tortures, des exactions commises contre leur peuple ? Ils ne savent pas encore que, comme la plupart des Tibétains nés en Inde, ils sont apatrides. Ce qui leur tient lieu de passeport est une carte d'identité remise par le gouvernement Indien.qui mentionne leur nationalité : Tibétaine. Pourront-ils obtenir des visas pour voyager ? Pas au vu de leur carte d’identité qui est le plus souvent refusée par les services des douanes et de l’immigration. Comme tous les réfugiés Tibétains, ils possèdent aussi un "livret vert" distribué par l’administration tibétaine en exil. Auront-ils encore la détermination sans faille qui a animé leurs aînés dans la marche de retour au pays en 2008 stoppée à presque 100 jours de marche ? Un vieillard assis à l’ombre égrène son malla. Conserve-t-il du pays quelques lointaines images qui s’estompent ? Qu’en reconnaîtrait-il depuis la sinisation effrénée qui a amené des arrivages massifs de colons Hans en convois entiers par le train Golmud -Lhasa, gonflant ainsi la population de Lhasa qui est désormais chinoise à près de 70% …Samdhong Rinpoche, le Premier ministre du gouvernement d'exil tibétain a fui le Tibet en 1959, mais à 70 ans aujourd’hui, à Dharamsala, il se rappelle toujours sa patrie de façon très nette. Il confie avec un sourire mélancolique. "Les souvenirs de ma vie au Tibet sont plus clairs que mes souvenirs du jour d’hier " "Je me rappelle, dit-il, les couleurs et les formes des arbres dans notre monastère et les amis avec qui nous avons débattu." Le peuple tibétain est profondément pieux , et chacun de ses actes et des lieux où il vit porte la trace de sa foi . Les dates fastes et moments de culte sont pour lui essentiels, que dire des interdictions chinoises de fêter le Losar (nouvel an tibétain) comme les a dénoncées la poétesse Woeser , que penser de toutes les restrictions aujourd’hui imposées sur les cérémonies par la loi martiale du gouvernement de Pékin ? Début juin, au moment du Saka Dawa, le mois sacré du bouddhisme, le gouvernement chinois a intensifié les restrictions sur les activités religieuses des Tibétains à Lhasa. Par ailleurs, deux moines sont portés disparus depuis une rafle dans le monastère de Labrang le 14 mai 2009. Aucun respect non plus des lieux sacrés par les sociétés minières, comme c’est le cas dans le comté du Markham et de la montagne sacrée du Ser Ngol Lo, où les ressources du sous-sol sont « exterminées » plus qu’extraites, sans souci des pollutions qui en résultent pour le voisinage. A l’île de La Réunion où tous les réunionnais d’où qu’ils viennent, vivent ensemble dans le respect et la tolérance, et sont libres de leurs pratiques de culte traditionnelles, où le nouvel an qu’il soit chinois, tamoul, musulman, laïque est fêté sur la place publique de toutes les communes avec le soutien , les financements et les vœux des municipalités et des pouvoirs publics , comment imaginer que de nos jours sur notre planète, un peuple pacifique et non-violent soit ainsi privé d’un de ses droits essentiels : le droit de culte ? Majnu Ka Tilla, 7 heures du matin, un jeune homme déplace la poussière d’un côté à l’autre de la rue…des petits marchands font cuire des momos … Quelques femmes en costume tibétain et tablier rayé font leurs courses , la couleur vive safran et rouge de deux robes de moines, tranche sur le fond de murs où s’achèvent de s’effriter des affiches militantes : souvenirs du 11ème Panchen lama dont le visage éternellement poupin est gravé dans nos mémoires, annonce d’une réunion, ou d’un meeting commémoratif …. Un temple, une école et un petit dispensaire de soins ainsi qu’un hébergement pour les moines complètent le dispositif d’accueil…..la vie poursuit son cours, loin de sa source …..mais vers quoi s’écoule-t-elle ? Le 6 juillet prochain, Sa Sainteté, le 14 ème Dalaï lama fêtera ses 74 ans , dont 50 années d’exil, loin de son pays . Peut-il encore rêver revenir un jour sur le sol de son pays natal, là où le petit Tenzin Gyatso jouait insouciant sous le regard tendre de sa mère ? Parce que la vraie mémoire est celle des moments heureux, quels qu’ils soient, d’où qu’ils viennent, et où qu’ils aillent… » Jean-Louis Marteil Poèmes d’un Tibétain né en exil - Tenzin Tsundue est un poète né à Manali (Inde) dans le milieu des années 70 . Il ne connaît pas la date de sa naissance non déclarée. Il a franchi à pied les cols enneigés himalayens pour se rendre dans le pays de ses ancêtres, où il a été incarcéré par la police chinoise, pendant trois mois et torturé, avant d’être expulsé vers l’Inde . Depuis, il porte et portera jusqu’à la libération du Tibet un foulard rouge autour du front. Ses moyens d’action sont l’écriture, les manifestations et l’escalade de différents buildings dans le monde pour attirer l’attention internationale sur la cause tibétaine. Il est le héros de tous les jeunes Tibétains révoltés . http://www.friendsoftibet.org/ REFUGIE Lorsque je suis né ma mère m’a dit tu es un réfugié Notre tente au bord de la route fumait sous la neige. Sur ton front entre tes sourcils est gravé un grand R m’a dit mon instituteur. Je grattai, je frottai, sur mon front je découvris une marque de souffrance rouge. Je parle trois langues. Cella qui chante est ma langue maternelle. Le R gravé sur mon front Entre mon anglais et mon hindi Dans la langue tibétaine signifie : RANGZEN (Liberté se dit Rangzen) MAISON D’EXIL Notre toit de tuiles fuyait Et les murs menaçaient de s’écrouler Mais nous allions bientôt rentrer chez nous, Nous fîmes pousser des papayers Devant notre maison Des piments dans notre jardin Et des changmas *pour nos palissade, Puis des citrouilles se mirent à rouler sur le toit de l’étable De jeunes veaux trottèrent hors de la crèche, De l’herbe sur le toit, Des haricots germèrent et Grimpèrent le long des vignes De la monnaie du pape se mit à ramper par la fenêtre Notre maison semble avoir pris racine. Les palissades se sont transformées en jungle, Et maintenant comment puis-je dire à mes enfants D’où nous sommes venus ? *Changma : arbuste que l’on plante en guise de palissade In Kora, combat pour le Tibet - 2006 L'Harmattan « Tant qu’on parlera du Tibet, le Tibet survivra » Sa Sainteté le 14ème Dalaï Lama

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