dimanche 25 avril 2010

TibetNews : Quand le malheur des tibétains fait les affaires de la propagande chinoise …

CLAUDE B. LEVENSON - LE GRAND BIVOUAC

Montagnards, randonneurs ou voyageurs auront sans doute immédiatement rectifié d'eux-mêmes : le récent séisme ne s'est pas produit en Chine, mais au Tibet. Il aura cependant fallu près d'une semaine à la presse internationale, il est vrai chichement informée de sources officielles chinoises, pour se rendre à l'évidence : la présence quasi immédiate de moines tibétains accourus au secours des sinistrés ne laissait guère place au doute, même si la région haut perchée et reculée n'était pas forcément très connue. Les mots ayant leur signification particulière en particulier dans un tel contexte, d'emblée on a pu relever que les nouvelles de Pékin mentionnaient le Qinghaï (au nord-ouest de la Chine) et des « ethnies minoritaires », avant de devoir reconnaître que ces régions appelées Kham et Amdo jusqu'en 1965 étaient à 95% tibétaines et que les victimes les plus nombreuses sont « d'ethnie tibétaine ».

Tout aussi choquante la façon de s'exprimer des agences de presse internationales reprenant ces termes à leur compte, jusqu'à ce que, dans la presse anglo-saxonne dumoins, des Tibétains exilés donnent de la voix. Ils ne semblent guère avoir été entendus dans la presse européenne. A croire que s'est subrepticement imposée ces derniers temps une tendance nouvelle, potentiellement révélatrice, du « chinoisement correct », allant jusqu'à nier aux victimes leur propre identité, leur droit de mourir en Tibétains comme ils avaient, plutôt mal que bien, vécu depuis un demi-siècle sous la férule répressive d'un régime qu'ils perçoivent comme étranger.

Et la journée nationale de deuil décrétée par Pékin n'arrange en rien les choses – avec l'ordre intimé aux moines de regagner leurs monastères, y compris à ceux de Sera venus de Lhassa, et l'interdiction faite à des commerçants tibétains de la région d'apporter eux-mêmes des secours, sous prétexte que l'aide devait être distribuée uniquement par des organismes officiels.

Si le gouvernement reconnaît que le nombre des morts dépasse 2.000, dans des monastères des alentours, des moines ayant accompli les rites funéraires ont brûlé plus de 2.000 corps en un seul jour, tandis que les bûchers continuent de brûler. Et si le président Hu Jintao a interrompu son voyage sud-américain afin de rentrer « diriger les secours », les images montrant son rapide passage sur place n'ont guère besoin de commentaires, alors que des rescapés ont remis une lettre aux autorités les priant de laisser le Dalaï-Lama, né en Amdo, venir les réconforter… Mais qui donc aujourd'hui en Chine aurait le courage politique d'une telle initiative ?

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